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FOLIO DU BLANC-MESNIL
26 octobre 2012

LA BAISSE DU COUT DU TRAVAIL: SORTIR DE L'IMPASSE LIBERALE

Fin aout, Pierre Moscovici, le ministre de l'Economie et des Finances, déclarait que le cout du travail n'était pas une « question taboue ». Quelques jours plus tard, François Chérèque enfonçait le clou: « le cout du travail est aussi un facteur de perte de compétitivité. » dans ces discours, c'est la baisse du cout du travail qui n'est pas taboue ( et non sa hausse jamais évoquée). Cette pensée voit dans la hausse des salaires un frein à l'emploi et dans leur baisse un des moyens de diminuer le chômage. Il faut distinguer dans ce débat deux questions de nature différente.

La première est avant tout de nature politique. Elle porte sur le mode de financement de la protection sociale. Jusqu'à quel point faut-il en socialiser le cout? Sous quelle forme? On peut mobiliser dans ce débat des arguments de nature économique, mais ceux-ci sont de second ordre. Car que ce soit par l'impôt, par les cotisations sociales où par des prélèvements privés, ce sont toujours au bout du compte les ménages qui supportent le cout de la protection sociale. Pour accéder au même niveau de vie qu'un salarié français, un salarié américain doit payer ses propres assurances sociales et gagner un salaire plus élevé.

La seconde question renvoie davantage à un débat économique. Le cout du travail en France est-il « trop élevé », ce qui nuirait à l'emploi et à la compétitivité? Posée ainsi, cette question n'a guère de sens. Car ce qu'un employeur est disposé à payer pour embaucher un salarié est toujours un rapport avec ce qu'il espère en retirer ( sa productivité en termes économiques). C'est donc le rapport entre le cout du travail et sa productivité qui est pertinent. Prenons l'exemple du salaire minimum. En proportion de la productivité horaire moyenne ( la valeur ajoutée par heure travaillée) , le cout horaire du salaire minimum se situe aujourd'hui à son plus bas niveau depuis soixante ans (environ 23%), soit près de deux fois moins qu'à l'époque de sa création au début des années 1950 (environ 45%). Sans les exonérations de cotisations sociales sur les « bas salaires », ce ratio serait de 28%, soit à peu prés le niveau observé avant l'instauration du SMIC, en 1970; après une période où le salaire minimum avait considérablement chuté. Difficile de conclure dans ces conditions que le niveau du salaire minimum serait un problème.

Le même constat vaut plus généralement. Le cout du travail en France est comparable à celui de nos principaux voisins alors que notre productivité est bien plus élevée, supérieur par exemple de plus de 20% à celle de l'Allemagne. Dans ces conditions, freiner sur les salaires c'est surtout casser la demande et comprimer l'emploi. Il serait temps de sortir de cette impasse.

 

Article de : Pierre Concialdi, chercheur à l'Institut de recherches économiques et sociales. Irés.

Alternatives Économiques n° 317 – octobre 2012

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