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FOLIO DU BLANC-MESNIL
23 avril 2009

La tête à gauche

INCROYABLE MAIS VRAI

Mars 2003 : la question de la trajectoire suivie par François Bayrou et ce qui s’appelait alors l’UDF est posée, après leur soutien à une motion de censure présentée par la gauche à l’Assemblée Nationale. Dans mon livre Comment peut-on encore être socialiste, je pronostique que le chemin entrepris par François Bayrou est sans retour, et que nous allons devoir repenser nos rapports avec les centristes. Pronostic qui va ensuite se trouver conforté année après année, au gré du parcours du leader de l’UDF, qui le voit passer progressivement du soutien à l’opposition à la majorité présidentielle.

Campagne présidentielle de 2007 : alors qu’une partie du PS joue ouvertement la carte François Bayrou, affaiblissant par-là même notre candidate, la question est posée, au soir du premier tour, des conditions d’un rassemblement majoritaire. Avec Ségolène Royal, nous essayons d’y apporter une réponse dans l’urgence, pour rattraper le retard accumulé depuis quatre ans : elle prend la forme d’un débat public et transparent avec le candidat de l’UDF, sans négociation d’arrière-salle ni tentative de débauchage. Cette solution s’organise avec les plus extrêmes réserves – pour rester pudique – de la direction d’alors du Parti socialiste. Sans une mobilisation claire du PS, nous ne sommes pas capables, aux termes du débat, d’en tirer les bénéfices politiques possibles. Congrès de Reims, automne 2008 : tout au long de la phase préparatoire, puis de la phase finale dudit congrès, un affrontement artificiel est soigneusement construit, au sein du PS, entre pro-MoDem et anti-MoDem, distinction censée recouper celle entre anti-rassemblement de la gauche et pro-rassemblement de la gauche. La majorité composite qui finit par l’emporter se revendique d’une ligne « mains propres » contre toute alliance avec le parti centriste, alors même que certains des camarades les plus éminents de cette majorité ont été élus, aux élections municipales, avec le soutien des représentants locaux de François Bayrou.

Durant toutes ces périodes j’ai, pour ma part, défendu avec constance l’idée d’une coalition arc-en-ciel, comprise comme un rassemblement sans exclusive de toute la gauche, autour d’un contrat de gouvernement, proposé ensuite comme base de discussion à toutes les autres forces de progrès voulant nous rejoindre. A aucun moment il n’a donc été question de renversement d’alliance, comme on l’entend parfois. D’ailleurs au moment des municipales 2008, à Pau, quand François Bayrou prend la décision de se présenter contre le PS, c’est sans état d’âme que le porte-parole que j’étais alors a énergiquement pris la défense de notre candidate, Martine Lignères-Cassou, tout en dénonçant l’opportunisme du président du MoDem. Je constatai d’ailleurs, à ce moment, que ceux qui allaient devenir, dans leurs discours, de virulents contempteurs du parti centriste, étaient alors très prudents dans leur dénonciation, comme si certaines circonstances électorales locales avaient pesé sur leur jugement.Avril 2009, enfin. François Hollande appelle François Bayrou à une discussion claire et publique, pour identifier les points d’accord et de désaccords entre socialistes et centristes, et poser les fondements d’un futur rapprochement. Claude Bartolone, tout en critiquant en apparence cette démarche, défend sensiblement la même approche du problème. J’espère, pour ma part, que celles et ceux qui n’ont cessé, depuis des années, de nous sommer de nous expliquer sur notre position vis à vis du MoDem, vont désormais clarifier et assumer la leur.Pour en revenir au fond, cette stratégie de dialogue politique avec le MoDem est évidemment la bonne ; elle peut nous sortir de la tentation de l’antisarkozysme primaire, et de la course derrière l’extrême gauche qui l’accompagne. Elle est même rendu chaque jour un peu plus urgente, pour donner le sentiment aux Français qu’une alternative est possible, incarnée par un large rassemblement de progrès. A condition de respecter les priorités : d’abord, rassembler toute la gauche, pour que ce soit la famille de la gauche réunie qui tende la main aux autres progressistes, et les mette devant leurs responsabilités.On me rétorquera qu’une partie de la gauche ne voudra jamais assumer une telle alliance et qu’il faut, en conséquence, choisir ou bien la voie du rassemblement à gauche, ou bien celle du rapprochement avec le centre. Prenons alors une illustration concrète de cette démarche : comment pourrait-elle se mettre en place à l’occasion des européennes ? Faut-il faire subir une défaite à la droite libérale en Europe ? Oui. Le fait que José Manuel Barroso ne soit plus le président de la commission serait un symbole politique fort. La gauche européenne peut, pour ce faire, commencer par proposer une grande candidature de rassemblement avec les écologistes. C’est alors que le dialogue avec François Bayrou – qui s’est prononcé contre la reconduction de Barroso – prendrait son sens ; il pourrait contribuer au remplacement du président de la commission à travers la perspective ouverte. Dans le même temps, à l’extrême-gauche de savoir si elle veut prendre la responsabilité, en faisant cavalier seul, de faire ré-élire le président sortant.La coalition arc-en-ciel n’est donc pas un vain mot : elle peut-être ébauchée ici et maintenant.

JULIEN DRAY

Téléchargez le n°148 de la tête à gauche : Tag_148

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