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FOLIO DU BLANC-MESNIL
15 juillet 2021

Placer l’Ecole et l’Education au coeur de notre programme de transformation écologique et sociale Par Génération•s

Génération

Placer l’Ecole et l’Education au coeur de notre programme de transformation écologique et sociale
Par Génération•s
1. Un enjeu politique central

Lors des échéances à venir, et en particulier l’élection présidentielle, il ne fait pas de doute que la droite LRM/LR ainsi que le RN vont placer la question de la sécurité au centre, promouvant deux versions d’un capitalisme à la fois hyper-concurrentiel et policier, répressif, lequel n’a cessé de s’affirmer jusqu’ici sous le quinquennat d’Emmanuel Macron. 

Les sondages orientés (par exemple celui sur la peine de mort, « l’assistanat » …), les provocations racistes de toute une frange de l’extrême-droite (Valeurs Actuelles en tête) prétendent d’ores et déjà dicter cet agenda, assorti s’agissant du RN d’une obsession identitaire mortifère.

Les forces conservatrices, réactionnaires, vont tenter d’utiliser la crise que leur propre modèle a créé à cette fin. Avec la crise économique majeure qui a été précipitée par la crise sanitaire, et l’accroissement des tensions sociales et des difficultés pour des millions de personnes à faire face aux exigences du quotidien, le refrain de « l’autorité » va être entonné jusqu’à la nausée. 

Face à cette offensive réactionnaire, c’est l’Education, au sens large, qui peut et doit servir de ligne de résistance et de construction d’une alternative pour la Gauche et les écologistes. 

La parution récente de deux livres (Dubet et Meirieu) reliant la question de l’Education et de la Démocratie montre que cet enjeu commence à être saisi et abordé. Il revient aux forces de Gauche et de l’Ecologie politique de s’en saisir, dans toutes ses dimensions, pour en faire le levain d’une alternative politique aux forces libérales et régressives qui entendent tenir le haut du pavé. 

Il s’agit aussi de pouvoir renouer avec le million de travailleurs de l’enseignement qui ont largement déserté la Gauche au fil des déceptions cumulées de ces dernières décennies.

On se souvient de la phrase prêtée à Victor Hugo : « ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons ». L’Education ou la répression, l’alternative – dans des termes bien différents qu’alors – est bien celle qui est posée à notre société. 

2. Un système éducatif en grande souffrance 

Si l’on devait poser un diagnostic de notre système de formation – les différentes thématiques proposées ci-après l’affinent – le mot de souffrance ne serait pas de trop. 

C’est un système en souffrance, malgré les efforts de tant et tant d’éducateurs et d’enseignants. Souffrance des enseignant.e.s souvent isolé.e.s chacun.e dans sa classe, soumis à des injonctions contradictoires, au verticalisme de l’institution et du Ministre, ressentant une profonde dévalorisation de leurs métiers – y compris financière – qui se traduit par la baisse du nombre de candidats aux concours de recrutement.

Souffrance de centaines de milliers de jeunes issus le plus souvent des milieux populaires, qui sortent sans qualification, ou sont relégués dans des filières professionnelles ségréguées après être passés par des Collèges ghettoïsés. Souffrance qui peut se mesurer à l’aune du nombre de « décrocheurs » durant le confinement, soit autour d’un million d’élèves « perdus de vue » par leurs enseignant.e.s, selon l’étude publiée par le Ministère lui-même. 

Souffrance aussi du service public mis en concurrence via les enquêtes Pisa dévalorisantes, qui prétendent coucher les différents systèmes éducatifs sur un lit de Procuste d’évaluations standardisées auxquelles, si l’on écoutait le ministre, le système éducatif aurait comme vocation essentielle de préparer les élèves. 

Ce n’est pas une question de « boutique », mais de projet de société

Il ne s’agit pas pour Génération-s d’adopter dans son coin un programme complet, hyper-détaillé, sinon technocratique, centré sur l’école, les enseignant.e.s, leur statut, etc. 

Il s’agit de mettre en avant une série de propositions saisissables par tous, concrètes, larges, sur des thèmes transversaux aux différents volets que doit articuler une politique éducative : Ecole, Formation professionnelle, formation continue, éducation populaire. 

Ces propositions s’appuient sur le travail de défrichage opéré depuis 2017 par notre Comité thématique et ses membres. Elles se situent dans la perspective qu’indique Philippe Meirieu dans la conclusion de son dernier livre : « un autre monde est possible : un monde où le désir d’apprendre est plus fort que celui de posséder, où l’entraide et la coopération l’emportent sur la concurrence et la rivalité, où une parole commune parvient à émerger du tumulte. » Et l’Education en est une des clés. 

C’est du grand défi des années qui viennent dont nous devons parler au travers du prisme de l’éducation au sens large : du combat pour refonder une société écologique, une société plus juste, plus démocratique, plus solidaire, une société de la transition. 

3. Nos propositions 

Lutter contre les inégalités

Eléments de diagnostic :

C’est un fait avéré que notre système éducatif ne contribue pas – c’est une litote – à la réduction des inégalités. Le déterminisme social et géographique reste prédominant dans la réussite scolaire : « Les enfants vivent au même moment dans la même société, mais pas dans le même monde. » (Lahire) 

Tandis que les étudiants de classes préparatoires aux grandes écoles sont les mieux dotés en terme de dépenses par élève, 10 % des élèves fréquentent un établissement qui accueille au moins 63 % d’élèves issus de milieux socialement défavorisés. Et c’est dans ces derniers établissements que les enseignant.e.s sont les moins expérimenté.es, ou encore qu’on trouve le plus de précaires (deux fois supérieur à la moyenne nationale en REP+). La carte scolaire ou le rôle de l’enseignement privé sous contrat ne font, sauf exception, qu’aggraver ce phénomène qui fait du « code postal un facteur prédictif de l’échec scolaire » (OCDE).

Enfin la formation professionnelle voit la part des enseignements généraux réduits à la portion congrue tandis que le patronat met de plus en plus la main sur la formation professionnelle. 

Propositions soumises au débat :

– Introduire comme condition de la contractualisation avec l’enseignement privé l’obligation de recruter des élèves à l’image de ceux de leur secteur de recrutement, socialement et scolairement.

– Mettre en place un service public de la petite enfance pour accueillir tous les enfants dès le plus jeune âge, favorisant l’éveil des tout-petits et permettant aux deux parents de poursuivre leur carrière professionnelle.

– Utiliser la carte scolaire pour mettre fin aux situations de ségrégation sociale qui frappent certains établissements.

– Développer des lycées polyvalents regroupant toutes les filières du secondaire (générale, technique, professionnelle) pour changer le regard porté sur l’enseignement professionnel. Rétablir un socle sérieux d’heures d’enseignement général dans le bac pro.

– Assurer une vraie personnalisation du suivi des élèves : groupes de besoins, enseignant.e.s surnuméraires, temps de concertation et de formation considérablement accrus.

– Pilotage public de la carte des formations professionnelles pour une vision à long terme : mettre fin à la mainmise du patronat sur la formation professionnelle pour en faire un réel facteur d’émancipation des travailleurs, notamment ceux sortis les plus tôt du système éducatif avec un véritable droit à la formation accru pour ceux-ci.

Agir pour la transition écologique

Eléments de diagnostic : 

En termes d’infrastructures publiques, les établissements scolaires forment un maillage serré de tout le territoire national. Or, ils sont souvent les témoins d’une époque d’où les préoccupations de sobriété énergétiques étaient absentes. Il en va encore souvent de même pour la restauration scolaire. 

Dans le même temps, tant les programmes que les formations délivrées n’intègrent la question du réchauffement climatique qu’à la marge, et ne laissent que peu de place aux compétences relevant de l’éducation manuelle ou technologique. 

Enfin, la formation professionnelle laissée entre les mains des grandes entreprises n’en est que plus orientée vers les exigences du profit à court terme et de la compétitivité qui sont précisément les sources de destruction de l’environnement, de la planète. 

Propositions soumises au débat :

– Un plan massif de rénovation thermique des locaux scolaires, vers la sobriété énergétique, et ainsi que de conversion des cantines au local et au bio. 

– La revalorisation dans les programmes et les volumes horaires de la culture manuelle, technique et technologique.

– La rénovation des filières professionnelles, technologiques et du supérieur pour former aux métiers de demain : économie des circuits courts, relocalisations, énergies renouvelables.

Promouvoir la transition démocratique 

Eléments de diagnostic :

Notre système éducatif est particulièrement marqué par le verticalisme et l’autoritarisme, en passant par le colonialisme, qui y ont laissé leur empreinte depuis Napoléon jusqu’à la 5e République. La tendance à vouloir « dresser » les élèves au lieu des les mener à se doter des instruments de leur émancipation se manifeste jusque dans l’organisation de l’espace scolaire. 

La comparaison avec d’autres systèmes de pays économiquement dominants est à cet égard frappante. 

Alors que la tentation autoritaire saisit de plus en plus de pays capitalistes développés, doter les futurs citoyens d’un esprit critique et non de soumission aux directives est une exigence urgente. 

Il faut promouvoir – cf Z.Baumann – une « culture du dialogue » à l’Ecole. 

A cet égard, notre conception de la « citoyenneté » ne peut être celle d’un seul apprentissage des règles et de leur respect, mais de leur compréhension critique – ou encore celle du passé colonial de la France qui structure encore aujourd’hui largement toute la société.

Il en va aussi de même dans la gestion qui est faite aujourd’hui des enseignant.e.s. 

De l’imposition de « réformes » contre l’opposition majoritaire des organisations syndicales et des parents d’élèves à la gestion locale des établissements laissée de facto au bon vouloir des chefs d’établissements en passant par la suppression des Commissions Paritaires dans lesquelles un contrôle du travail de l’administration pouvait s’effectuer, le verticalisme et l’autoritarisme, sinon le harcèlement moral, ont le champ libre pour s’exprimer. 

Propositions soumises au débat :

– Assurer le caractère inclusif de l’Ecole et du Collège, comme autant de lieux de brassage des futurs citoyens. Favoriser l’intégration des élèves en situation de handicap.

– Valoriser dans les programmes et dans les modes d’enseignement l’expression des élèves notamment à l’oral, parent pauvre encore aujourd’hui de notre système. Aller vers une Ecole « laboratoire citoyen » avec formation des élèves. 

– Changer la gouvernance des établissements scolaires pour lui donner un caractère collectif et concerté. 

– Rendre impossible qu’une réforme non votée au parlement puisse s’appliquer dans l’Education contre une opposition largement majoritaire des organisations représentatives des personnels et des usagers, et rétablir les Commissions Paritaires Administratives. 

– Permettre aux futures génération-s de s’approprier le passé de notre pays pour permettre une véritable éducation anti-raciste et anti-sexiste des générations à venir. 

– Ouvrir l’Ecole aux partenaires naturels de l’Education populaire en lien avec des rythmes scolaires respectant davantage l’éveil des futurs citoyens. Faire ainsi des établissements scolaires des lieux de vie de leurs quartiers. 

Produire du Commun

Eléments de diagnostic :

Notre société et notamment les sociétés de l’économie du numérique (Gafa) pousse à l’entre-soi, au repli individualiste utilisé au service d’une consommation destructrice. C’est en particulier vrai pour la jeunesse, qui est soumise au effets des écrans, d’une économie de captation de l’attention (cf. Stiegler) qui a des effets dévastateurs sur la construction de leur intellect et leur capacité d’empathie. 

Dans les établissements scolaires, d’une part les élèves sont mis en compétition les uns avec les autres et les enseignant.e.s laissés à la possibilité de l’isolement, sans temps dévolus au travail ou la formation en équipe. Mais au-delà même des établissements scolaires, les espace permettant de se retrouver en dépassant les appartenances de groupe immédiates sont de plus en plus difficiles à trouver, alors qu’ils sont indispensables pour créer du commun, pour « faire société ». 

Propositions soumises au débat :

– Instauration d’une sixième semaine de congés payés conditionnée à un projet de formation des salarié.e.s ou des privé.e.s d’emploi. Ces formations seraient en priorité assurées par des associations du mouvement de l’Education populaire.

– Penser l’Ecole comme un lieu de vie au cœur d’un territoire, d’un tissu social, dans la « ville du quart d’heure ».

– Mise en place de temps communs de travail en équipe dans les établissements pour les enseignant.e.s, et d’une formation continue obligatoire pour celles-ci et ceux-ci, comme il en existe en fait dans toutes les branches professionnelles. 

– Multiplier les dispositifs et possibilités de mobilité des personnels à l’étranger dans la formation.

– Développement de la coopération entre élèves à l’école, par des dispositifs de travaux de groupe ou de mentorat, ou d’autres dispositifs type classe inversée (d’où la nécessité de la formation des enseignant.e.s).

– Apprentissage de la maîtrise des instruments numériques et limitation de la durée d’exposition des enfants aux écrans.

Conclusion 

Ces idées, ces propositions, que nous rassemblons ici, émanent en réalité d’un intellect collectif qui n’a pas vraiment de correspondant politique : celui de celles et ceux qui, depuis les chercheurs en sciences humaines jusqu’aux acteurs de terrain, cherchent à changer l’Ecole pour transformer la société.

Au moment où les obscurantismes de toute sorte déferlent comme des vagues menaçant d’emporter par le fond une société fragilisée, refaire battre le cœur de l’Ecole, en faire un thème politique central et commun pour la Gauche et les Ecologistes est un enjeu décisif.

Generation.s Education
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